La mémoire du passé inspire l’avenir. Voilà comment Gisèle conçoit sa mission de guide du patrimoine. Nous lui avons laissé carte blanche pour un voyage dans le temps au gré d’anecdotes. Et parce qu’ici, la beauté des paysages naturels est intimement liée à l’histoire du village, elle nous emmène aussi à la découverte de quelques sites incontournables. Suivez le guide !
L’histoire… et les histoires. Autrefois en hiver, les habitants d’un même hameau se réunissaient le soir pour les veillées. Les hommes jouaient au tarot, les femmes tricotaient ou brodaient en bavardant. Vers 23h, la veillée se terminait car le travail commençait vers 5h du matin. On se séparait en disant : A d’man !
Lors des veillées dans les familles ou chez les amis, on contait les légendes des anciens, on chantait, on mangeait des gâteaux de Savoie autour d’un café ou d’une gnôle locale. Pour les fêtes de Noël, les maîtresses de maison préparaient les rissoles, ces carrés de pâte fourrés de compotes de poires ou de pommes avec parfois des raisins secs. Il faut savoir « plier les rissoles » pour ensuite les cuire dans l’huile très chaude, avant de les déguster tièdes en fermant les yeux de plaisir.
Si les veillées étaient l’occasion d’échanger des nouvelles et des potins, elles permettaient aussi aux jeunes de se rencontrer. Ils affluaient avertis par le bouche-à-oreille, surtout dans les familles ayant plusieurs jeunes filles à marier. Ce type de veillée était appelé un « bon coup ». C’était le Tinder de l’époque !
Les jeunes dansaient en tapant le sol avec leurs « socs », mot patois désignant les sabots. Irritées par le bruit, les mères disaient : « Arrête de socaler ». C’est l’origine du groupe folklorique Lou Socali, créé dans les années 70 à La Clusaz. Au son de l’accordéon et du violon, des musiques savoyardes accompagnent les danses. Les hommes portent des blouses et des chapeaux de feutre ; les femmes de magnifiques robes ou des jupes, des tabliers et des châles brodés. Les demoiselles portent une coiffe blanche, les femmes mariées une coiffe noire.
Il y aurait tellement d’histoires à raconter… Pour moi, s’intéresser au patrimoine n’est pas un comportement passéiste, mais une manière de mieux comprendre sa place dans le présent pour construire l’avenir. La Clusaz a le privilège d’être bien plus qu’une station de ski : elle est d’abord un village avec un passé, un environnement exceptionnel et une architecture traditionnelle. Conserver et exploiter cette richesse est primordial, encore plus aujourd’hui où tout s’accélère et se bouscule.
Les flâneries de Gisèle
« To l’mando a l’eura, mé nyon a l’tin ! – Toute le monde a l’heure mais personne n’a le temps ! » Je vous invite donc à prendre le temps de la découverte. De la Pointe Percée à la Tête du Danay, du lac de Tardevant à l’Etale, vous avez de belles et longues randonnées à savourer. Toutefois, je vais vous parler ici de balades qui privilégient le plaisir de la marche et la contemplation.
Petite balade pédagogique
Depuis le centre du village, une marche de 20 minutes avec des bornes explicatives vous conduira au Hameau des Alpes. L’eau fraîche du bachal (bassin en patois) récompensera vos efforts. Ensuite, place au farniente vers les tables de l’ancienne scierie rénovée, qui fonctionne grâce à l’énergie de l’eau. Si l’envie de tout connaitre sur l’histoire du Reblochon et du ski vous anime, je vous attends pour une visite du Hameau !
La Vierge du Chatelard
Environ 700 m après le Col des Aravis, garez-vous dans le virage au-dessus de la Croix. En 30 minutes et moins d’un kilomètre de montée, vous arriverez à cette belle vierge au pied de la Porte des Aravis. Reposez-vous et contemplez les fleurs à vos pieds et le Mont Blanc qui brille sous le soleil. Vous aurez peut-être la chance d’apercevoir une harde de chamois…
La Croix de Colomban sur le plateau de Beauregard
C’est mon coup de cœur. Enfants, nous montions à l’assaut de cette petite montagne, avant de nous gaver de myrtilles en admirant la vallée. Les senteurs, l’ambiance et les précieux souvenirs liés à ce lieu sont toujours présents dans ma mémoire.
La croix au sommet de l’Aiguille des Calvaires
Voici une marche un peu plus relevée mais chargée d’histoire. Partout dans les Alpes, des croix étaient érigés pour demander la protection de Dieu contre les avalanches ou une météo clémente pour le travail des champs. En 1816, La Clusaz connut une grande disette. Les paroissiens se rendirent au sommet de l’Aiguille pour obtenir la fin des pluies interminables. A côté de la Croix, le petit oratoire avec une Vierge a été construit par Marcel Perillat, qui s’était promis de le faire s’il revenait vivant de la seconde guerre mondiale.
*Gisèle est responsable du site du Hameau des Alpes, qui propose un espace ludique sur le Reblochon, un musée dédié à l’évolution du ski, un four banal, des greniers traditionnels et une ancienne scierie.